Réédition RSD2017 / 1995: Luna – Penthouse

La bombe indie smooth rock reçoit un traitement de luxe pour le Record Store Day.

Album : Penthouse
Artiste : Luna

V.O: 1995 Vinyle simple, Beggars Banquet, BBQLP 178

En Test : 2017 Vinyles doubles pour RSD

Étiquette : Elektra, Rhino Records
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Une des raisons pour lesquelles j’aime la musique est qu’il y a une quantité ridicule d’univers différents et fascinants qui méritent amplement d’être découverts. Tant que personne ne vous parle d’un groupe, ce groupe risque de rester totalement hors de votre collimateur. Hélas, ce n’est pas les services d’écoute en continu qui vont vous aider à ce sujet, les étiquettes et distributeurs préférant s’assurer que leurs poulains se retrouvent en premier dans les recherches. Et c’est tout aussi vrai pour les vieux disques d’il y a 20 ans qui sont ressortis des boules à mites, quand le groupe est dissous depuis longtemps. Luna fait partie de ces groupes mythiques qui sont méconnus. Leur disque Penthouse est le 99e des 100 meilleurs disques des années 90 selon le magazine Rolling Stones. Ce disque en version originale ne s’achète qu’à des prix de trois chiffres. Et leur coffret de rééditions sorti il y a deux ans (à 105 exemplaires!!!) s’écoule dans les trois chiffres très avancés. Mais personne ne les connaît!

Et que dire du disque? Il est surtout composé de ballades avec un fort accent sur les guitares électriques. C’est un groupe purement rock, mais qui ne peut être classé dans les groupes soft rock réellement. C’est presque hard, mais très doux et planant, c’est des ballades. D’aucuns vont appeler ça du dreamy rock, moi je vais dire que c’est du indie. Le disque contient son lot de chansons ressemblant à du Sheryl Crow, d’autres un peu plus près des Velvet Underground (auquel ils ont fait la première partie à quelques reprises).

Le contenu? Le premier disque est une version intégrale de l’album original. Le deuxième disque est composé de matériel supplémentaire et de versions remixées des chansons. Pour le prix, c’est un très bel album en encart.

Et côté sonorité? C’est un superbe projet, belle réédition, beau remastering de l’album. Très très peu de bruit de fond, très peu de popcorn. L’album ne sonne pas du tout numérique et possède toute cette chaleur qu’on désire qui puisse être donnée à un vinyle rock. Le côté grinçant des guitares, le côté enveloppant de la basse, et un rythme fort effacé propre au style de Luna, tout y est. Pour être honnête, c’est aussi une des rares occasions qu’on peut avoir d’acheter le disque en bas de 50 $ (au moment de l’écriture de l’article) alors même si la qualité n’avait été qu’adéquate, ça aurait quand même valu la peine! Une chance pour nous, le disque possède une sonorité absolument superbe.

On achète si on aime Yo La Tengo, Galaxie 500, Mazzy Star.

2017: Isabelle Boulay – En Vérité

Après plus de 20 ans de carrière, Isabelle Boulay est prête à nous parler en toute vérité.

Album : En Vérité
Artiste : Isabelle Boulay

En Test : 2017 Vinyles doubles

Étiquette : Audiogram, Sony Music
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Ça faisait déjà trois longues années que Isabelle Boulay ne nous avait pas sorti un opus. Son dernier disque, Merci Serge Reggiani, était le premier disque de Boulay qui était produit en vinyle, mais c’était aussi un hommage à Reggiani, alors ce n’était que des chansons reprises de ce dernier. Si on désire avoir du matériel original, il faut reculer encore plus loin, 6 longues années sans aucune chanson originale. C’est long. Et aucune chanson originale en vinyle! Baptême de Boulay sur le format pour ses propres chansons! Il faut dire que cette dernière a été fort occupée sur plusieurs autres projets, dont La Voix qui occupe beaucoup de temps.

Comme mon but n’est pas de vous dire si j’ai aimé l’album ou non, je ne m’y étendrai pas particulièrement. Il s’agit d’un disque de Boulay! Si vous aimez cette dernière, vous allez l’adorer. Si vous ne l’aimez pas, c’est votre problème et je ne tenterai pas de vous convaincre du bien-fondé de cette extraordinaire artiste gaspésienne. Suffit de dire que les chansons de ce disque proviennent de tous les horizons, de Julien Clerc à Cœur de Pirate. Ce ne sont pas des chansonnettes.

Mais côté qualité? Ah, ça, par contre, c’est précisément mon but : vous faire découvrir des disques et vous dire si vous devriez acheter le disque vinyle. D’abord, la sonorité Boulay, ce ne sont pas avec de vrais instruments. C’est surtout du synthétiseur et ça paraît. Ce n’est pas nouveau avec elle, mais sur les pistes Protools se fait ajouter des instruments midi. Ça paraît. Mais dans le lot, les guitares sont souvent franches, les voix sont belles et surtout ça m’a sauté à la figure dès la première chanson du disque : de vraies cordes et un vrai orchestre! Wouah! Et la qualité du disque vinyle double, matricé avec soin par Marc Thériault, est vraiment excellente, assez afin de savoir quand une piste apparaît ou disparaît sur Protools, assez afin de savoir que cet instrument est un logiciel enfichable quand cette autre piste est fort naturelle. Un peu de bruit de fond sporadique sur le vinyle, mais je n’ai rien d’autre à redire sur cette gravure somme toute vraiment honnête. La sonorité qu’on a désiré y donner est la même que les disques des grands des années 80, par exemple des vieux Patricia Kaas. C’est une sonorité éprouvée pour la balade, formant le répertoire de Boulay, et c’est un plaisir à écouter sur vinyle. Grand disque vinyle? Non. Audiophile? Non. Numérique? Oui. Beau, sonore, efficace et s’écoutant avec plaisir : Définitivement!

On achète si on aime Laurence Jalbert, Lynda Lemay, Maurane, Natasha St-Pier.

Réédition 2017: 1995: Leftfield – Leftism

Le plus grand disque house de tous les temps? Et un partenariat de diffusion des critiques pour Fréquences?!

Album : Leftism
Artiste : Leftfield

V.O. : 1995 Vinyles double et triple
Hard Hands
HANDLP2D, HANDLP2T

En Test : 2017 Vinyle triple 180g

Étiquette : Hard Hands, Columbia Records, Sony Music
HANDLPT

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Le blogue des critiques de Fréquences fait boule de neige! À partir d’aujourd’hui, cinq mois après notre première offrande, les critiques de Fréquences le Disquaire seront dorénavant publiées en simultané dans Le Magazine TED par Québec Audio & Vidéo! Après de bons échanges (et quelques bières, verres de vin et kombucha), nous avons clarifié quel était le but de ces critiques. Les voici:

  • Faire connaître les disques vinyles modernes produits par l’industrie, peu importe les styles et genres, la qualité de distribution ou de production.
  • Aider à disséminer la joie d’écouter de la musique en faisant découvrir des disques anciens d’exception, peu importe s’ils sont disponibles ou non chez Fréquences.
  • Avoir une critique audiophile subjective sur la qualité de production des disques afin que les lecteurs puissent s’y retrouver et acheter en toute connaissance de cause.
  • Et surtout, redonner à Internet avec une archive de recherche permettant à des amateurs de musique d’en savoir plus sur leur disque en recherche.

Vous l’avez bien vu depuis le début, beaucoup des disques présentés ici ne sont pas ou plus disponibles chez Fréquences; on parle parfois des autres disquaires; on se fout du style musical, que ce soit de l’opéra au hardcore, tout y passe et aucun disque n’est jugé sur son contenu musical; certains des disques vinyles ne reçoivent pas des bonnes critiques; bref: le but n’est pas mercantile (ou sinon on serait vraiment pas business!) mais bien de partager notre amour de la musique. Et c’est pour ça que la publication à travers le Magazine TED est un recoupement incroyable: nous parlons de musique sur disques vinyles avec un auditoire accru recherchant de la qualité comme nous et ils ont des articles donnant leur appréciation sous la vision d’un audiophile.

Longue vie au partenariat!

Et en attendant, de retour à l’article original! On parlait de la réédition de Leftism par Leftfield.


L’histoire de ce disque est relativement banale. Un relativement bon duo britannique de musique «progressive house» du début des années 90 a décidé de sortir un album compilation de la majeure partie de ses succès du début de la décennie. Mais ils sont fous! Certains groupes ne vont graver que les meilleures versions de chaque chanson, il vont faire un album avec un mix de toutes les chansons ou y mettre toutes les versions radio parce que c’est Monsieur et Madame tout le Monde qui vont acheter les disques. Eh bien non, Leftfield refont les chansons pour le disque de A à Z, ils les imaginent de nouveau, les travaillent et changent leur style. Ils prennent aussi le temps et donnent la déférence nécessaire aux pièces musicales en ajoutant des chanteurs et collaborateurs pour toutes les pièces les nécessitant.

Il y a une sonorité particulière à Leftism. L’album ne peut pas être considéré comme «progressive house» ou même simplement house. En fait, la seule étiquette qui colle réellement est musique électronique. Certaines des pièces sont plus des dubs, d’autres sont plus jungle, d’autres ajoutent des relents de scratching, d’autres du old-style avec des 808, 303, du Oberheim… ou même une chanson comme Cut For Life qui possède tous ces styles et instruments dans la même pièce. L’album ne peut pas non plus être considéré comme ayant une suite logique; la sonorité y est, mais il n’y a pas réellement de progression comme un mix. En fait… si, il y en a une, mais ce n’est pas le but premier du disque.

Comme toute ancienne sonorité, il y a des choses qui vieillissent mal. Les instruments électroniques sont parfois inadéquats et il y a parfois des pièces musicales qui font leur âge. N’empêche que le disque s’écoute encore incroyablement bien. On l’apprécie par ses différents styles, ses chansons qui ont fait individuellement des succès et qui font un tout cohérent. On comprend parfaitement que le disque ait grimpé dans les Billboard et Top UK, ait reçu des prix et qu’il ait fait école. Ça serait comme dire que MCMXC A.D. de Enigma serait vieilli : bien… oui! et? Alors… le meilleur? On verra dans 20 ans mais à date, c’est bien parti!

Et la qualité? Ce disque triple possède la qualité de son défaut : trois disques avec très peu de matériel par face, prévu et conçu pour des DJ. Une sonorité superbe, forte, vraiment peu de bruit de fond, une absence quasi complète de popcorn, parfois un peu de bruit à cause des fréquences extrêmes. On change donc les faces à chaque onze minutes. Mais quelle expérience parfaite! Le disque provient d’un matriçage numérique effectué de main de maître par Matt Colton (qui a gagné le Music Producers Guild Mastering Engineer of the Year en 2013 – en écoutant ce projet, je dirais que ce prix est justifié) et le disque ne sonne aucunement numérique. Compressé, oui bien sûr, ça reste du house, mais chacun des instruments respire et on n’entend jamais un gros compresseur se faire aller, la musique est aérienne et pure.

On achète si on aime Underworld, The Chemical Brothers, Orbital, Fatboy Slim, danser.

RSD2017: Mad Professor meets Jah9 – In The Midst Of The Storm

C’est le temps de sortir ses dreads, Mad Professor est de retour avec son dub unique pour le RSD 2017!

Artiste: Mad Professor meets Jah9
Album: In The Midst Of The Storm

En Test: 2017 Vinyle RSD translucide et bleu

Étiquette: VP Records
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Ça fait 35 ans que le guyanais Mad Professor nous fait fumer du patchouli en quantité industrielle, et du vraiment bon stock. Il a collaboré avec les plus grands et continue de faire de la qualité ridicule de dub, moderne depuis 35 ans. Rien de old school avec le professeur fou, c’est toujours une sonorité de dub qui semble être composée hier.

J’ai connu Mad Professor avec son album sur lequel il a remixé l’album Protection de Massive Attack au complet, afin de faire l’incroyable No Protection. Tellement un bon album que je ne connaissais pas Massive Attack et je croyais que c’était l’album d’origine quand on me l’a présenté il y a 20 ans. Je suis resté bête quand j’ai découvert la version originale, une bombe faite par un groupe incroyable… mais encore aujourd’hui, pour moi, Protection, c’est la version de Mad Professor qui prime! Alors quand j’ai su que Jah9 passait dans le tordeur du professeur, c’est un des rares disques sur lesquels j’ai sauté dessus et souhaitais ardemment que personne ne le prenne avant moi au Record Store Day.

Côté sonorité, je ne suis pas déçu. C’est du gros dub sale et violent, avec le voix sublime de la jamaïcaine Jah9. le disque est très silencieux, il possède amplement de basse, ça groove, c’est chaud, c’est aucunement timide, c’est toute la couleur qu’on peut imaginer de tels monstres de la musique. Le disque est très bien imprimé, il faut dire que c’est un VP Records, spécialisé dans le reggae, les dubs et ayant produit le disque précédent de Jah9; ça aurait été étonnant qu’ils ne connaissent pas leur matériel. Ma déception est sur les coupures arbitraires des chansons du dub. Je sais jesaisjesaisjesais il y a une école qui fait débuter les dubs rapidement et les termine lorsque tout est dit. Mais je n’aime pas les fondus en sortie quand je sens que l’artiste peut débuter à broder. J’aurais aimé que chacune des chansons dure une face de disque et que Mad Professor ait eu le temps de broder chacune d’entre elles, quitte à les mixer ensemble. C’est mon côté fan de jazz modal qui parle ici qui aime les développements longs et passionnés, les soirées avec un DJ qui réussit à nous en faire voir de toutes les couleurs. J’assume d’ailleurs que ce disque va faire l’apanage de bien des soirées dub!

2014: The Neil Cowley Trio – Touch And Flee

Jazz? Check. Audiophile? Check. Pochette louche? Check!

Album: Touch And Flee
Artiste: The Neil Cowley Trio

En Test: 2014 Vinyle

Étiquette: Naim Jazz
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La petite histoire de Neil Cowley: pianiste avec un certain following, mais surtout un pianiste de session pour d’autres artistes. Entre autres, Emeli Sandé et Adèle (pour ses albums 19 et 21).

La petite histoire du trio: Trois amis. Cowley avec Evan Jenkins (pas le politicien, le batteur) et Rex Horan, bassiste. Tous trois musiciens de studio. Et trois fanatiques de jazz contemporain.

Et la petite histoire de Naim Records: Naim Audio est la marque britannique fort reconnue de systèmes de son, achetés il y a quelques années par Focal. On les reconnait à leur interface minimaliste et leur bouton parfois unique. Comme quoi Apple n’a pas inventé la simplicité. Projet de captation et de disques haute fidélité, Naim Records sort un peu de tous les styles avec fort peu de modifications et post-traitement. Les erreurs sont laissées, l’idée d’un disque presque en direct est conservé.

En d’autres mots, c’est un disque vraiment extraordinaire! Il faut aimer le jazz contemporain bien entendu et aimer les trios fort simples de piano, basse et batterie. C’est difficile d’arriver plus à la simplicité. Le disque n’est vraiment pas long, c’est presque un EP, mais il respire et transcende pleinement la philosophie de Naim Records.

Est-ce épatant? … c’est de belles chansons, ce n’est peut-être pas le trio qui va révolutionner le jazz … mais c’est beau, c’est bien, c’est cool à écouter et ça donne le goût de les écouter encore plus au Gesù le 4 juillet 2017!

2017: The Franklin Electric – Blue Ceilings

Deuxième album de The Franklin Electric, est-ce le poulain de Indica va créer un nouveau monstre ou va nous laisser tomber?

Album: Blue Ceilings
Artiste: The Franklin Electric

En Test: 2017 Vinyle

Étiquette: Indica Records
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The Franklin Electric, groupe montréalais à succès, a eu comme premier album This is how I let you down, un album qui a eu la chance d’être excellent, d’avoir été bien reçu par la critique, d’avoir eu un bon succès, et de leur avoir permis de signer avec Indica. Deux ans plus tard, voici la suite tant attendue.

C’est un peu aussi le problème d’avoir eu un si bon premier disque: rares sont ceux qui sont capables de suivre avec une deuxième bombe. Peu importe ce qui va être sorti, ça va toujours être déplaisant. Les gens aiment rester dans leurs vieilles godasses. Et la seule vieille godasse de TFE, c’est leur premier album. Aussi bon ce disque va-t-il être, il ne sera jamais correct pour les fans.

Vous le savez, je ne fais pas de critiques de stylistique. Je me fous en effet un peu qu’un disque soit bon, meilleur ou moins bon que les autres. Je désire quand même vous faire comprendre, si vous avez adoré le premier disque, que vous risquez d’être déçu de celui-ci. Pas que le disque est mauvais, moi je l’aime vraiment beaucoup, une belle progression de l’exubérance du premier. D’ailleurs, si vous ne connaissez pas TFE, ceci dit, vous risquez de faire de belles découvertes. Le disque est dans un mouvement bien montréalais de musique folk-pop-rock, un peu de Karkwa, un peu (beaucoup) de Half Moon Run, un peu de chansons à texte, bar enfumé mais pas le droit de fumer alors un son réellement propre.

Et le vinyle? Je ne suis peut-être pas déçu des chansons, mais je suis déçu de la qualité de la gravure, il s’agit clairement d’un disque provenant d’un même master que le CD. On remarque parfois que la basse écrête absolument inutilement (dont la première piste à certains moments), que des fréquences font des divergences qualitatives inutiles (les 3-4e pistes sur la face A). Écoutez simplement les moments forts dans les crescendos, comme vers la dernière minute de la face A, vous allez entendre une qualité de crunch et un écrêtage numérique à la place d’avoir un réel crescendo. Le disque est bon en tant que tel, c’est un beau vinyle, mais il n’a aucune présence réelle.

2015: Kendrick Lamar – To Pimp A Butterfly

Un album qui peut se targuer d’avoir changé la scène du hip hop en 2015. Il y a un avant et un après To Pimp…

Album: To Pimp A Butterfly
Artiste: Kendrick Lamar

En Test: 2015 Vinyle double 180g (US, République tchèque)

Étiquette: Top Dawg Entertainment, Aftermath Entertainment, Interscope Records
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Qu’est-ce qui représente la scène black aux États-Unis? Je vais bien entendu y aller avec des gros préjugés mais ils sont basés sur une réalité troublante. Les familles pauvres, la surreprésentation dans les prisons, les ghettos, le manque de possibilités, de ne pas avoir les mêmes opportunités qu’un blanc. Ça va aussi avec les gens qui sont du mauvais bord de la loi et qui vont faire trop d’argent. Ce n’est pas surprenant que d’entendre des chansons sur le sexe, la drogue, les tueries, les gold diggers, les maisons closes, etc.

Et dans les styles musicaux? Il y a bien entendu le rap, le hip hop, mais il y a aussi le jazz. Beaucoup vont prendre le jazz, surtout le free jazz, comme une musique d’esthètes, à écouter en sirotant un scotch hors de prix et de tripper sur … tripper sur quoi en fait? Bah, c’est bon, quel artiste, quel grand. Wow! C’est comme pour l’art contemporain, des tableaux obscurs qui prennent un post-doctorat en art afin de comprendre toute la subtilité. J’ai payé ce tableau 20K, tu imagines? Wow!

Justement … non!!! L’art contemporain, comme on va retrouver au MAC de Montréal, par exemple, est de l’art fait pour être compris et découvert par des gens qui habitent dans le sous-sol de leurs parents, c’est de l’art fait pour être apprécié au secondaire, au cégep, c’est de l’art fait pour être compris par la personne qui attends son chèque du B.S.! Ce n’est pas de l’art fait pour être vu de loin, au contraire, c’est de l’art qui représente une réalité, qui exacerbe une vérité de vie. C’est la même chose pour le jazz: musique noire des États-Unis, musique du ghetto, musique qui est aussi importante que le rappeur du quartier, voire plus. Lorsque certains disent “oui mais ce n’est qu’une borne fontaine”, il n’y a aucun génie apparent mais le génie est de représenter une vitrine sur la vie de tous les jours des gens normaux. Même chose pour les styles musicaux, dont le jazz.

Écoutez les films de Spike Lee, vous allez avoir ces thèmes, vous allez avoir en trame sonore constante le hip hop, les DJ, mais énormément de jazz, surtout de free jazz. C’est de la musique qui décrit une émotion, qui est fait pour être ressentie, pas uniquement écoutée. C’est aussi viscéral que le rythme tribal.

Et c’est ici tout le génie de Kendrick Lamar. Cet album a touché une corde sensible. Non content de ne faire que rabâcher le gangsta rap repenti ou non. Non content de seulement parler des femmes d’une façon condescendante. Non content de parler de la dernière personne à s’être fait tirer. Des textes qui reflètent la vie aux États-Unis quand on est black dans les années 2010. Et de la musique hip hop de superbe qualité, des musiciens de jazz et de free jazz, de swing, des relents de tribal, de la musique blues, de la musique funk, disco par extension. Un vrai film de Lee, justement.

Si je parle de ce disque autant, c’est que c’est la bombe. Mais aussi il est très long. Plus de 70 minutes. Lamar est trop prolifique probablement, hyperactif un peu. Je le vois un peu comme moi, qui prends trop de temps à écrire des critiques et des articles quand j’ai déjà des dizaines d’autres projets qui occupent mon temps, qui va en produire beaucoup à la place de produire une très grande qualité. On se perd d’ailleurs dans ses autres disques. Je suis fou de son autre disque Untitled Unmastered mais je suis plus froid sur son dernier, ou plutôt, je le trouve inégal. N’empêche que malgré sa longueur, To Pimp est bon de A à Z. Certains y voient un disque aussi important que Nevermind de Nirvana, j’ai tendance à leur donner raison. Il y a un avant et un après ce disque. La musique hip hop ne sera plus jamais pareille.

Et est-ce que ma table tournante, elle, va être heureuse? Il existe trois versions du disque. Une de la République Tchèque pour le marché des États-Unis, une des États-Unis et une d’Europe. J’ai eu vent que les trois versions sont très différents et que la version Euro serait la meilleure des trois. Je n’en sais rien. Ce que je sais, toutefois, c’est que cette version que je possède (Tchèque) est fort appréciable. Il y a parfois de petits manquements au son, parfois les aigus s’emballent un peu. Aussi, je le trouve très réservé, la basse est à sa place, les instruments sont à leurs place. Il ne semble pas y avoir de surprise. En fait, je dirais que la différence est que la version numérique ne semble pas avoir de suite logique, toutefois la version vinyle possède cette chaleur et ce point rassembleur qui en fait un album se suivant du début à la fin. C’est tellement prévu pour du vinyle qu’il y a même à quelques reprises des bruits de vinyles (dont le début du disque – ne vous inquiétez pas s’il semble y avoir du popcorn, même le CD en possède!). Votre table tournante va être très heureuse.

Réédition 2014: Incredible Bongo Band – Bongo Rock

Qu’ont en commun Grandmaster Flash, Jay-Z & Kanye West, Aphex Twin, Moby, The Roots et des centaines d’autres artistes dans les 40 dernières années?

Album: Bongo Rock
Artiste: Incredible Bongo Band

V.O.: 1973 Vinyle, Pride PRD-0028

En Test: 2014 Vinyle 180g

Étiquette: Mr Bongo
MRBLP118

Ce disque n’est plus disponible chez Fréquences. Demandez quand même si ça se trouve, ou attendez des arrivages, qui sait (mais je n’attendrais pas nécessairement)

Gagnant du disque le moins susceptible de révolutionner la musique, Incredible Bongo Band n’est pas un groupe malgré son nom! C’est pas mal le projet de Michael Viner qui a eu une demande d’une chanson pour un film d’horreur obscur. La chanson est devenue #1 au Canada alors il a reçu la demande de faire un disque entier, ce qu’il produisit à Vancouver avec l’aide de musiciens de studio pas mal au hasard. Tout est rigoureusement faux dans ce disque et de toute façon c’était prévu pour se faire imprimer en quelques copies et disparaître sans laisser de traces.

On se déplace deux ans plus tard dans le Bronx… DJ Kool Herc crée le principe du breakbeat, avec les break-dancers, les b-boys, les b-girls… et éventuellement, en 1975, il tombe sur Apache de Incredible Bongo Band, pour lequel il fait jouer deux disques en succession afin de faire poursuivre le break de Apache aussi longtemps que les danseurs dansent sur la chanson. Et à partir de ce moment, cette version louche d’un disque sans succès de Apache devint l’hymne du Bronx! Tous les partys se l’arrachent, tous les DJ l’utilisent, tout le monde le fait jouer, le hip hop est créé, le breakdancing est créé et tout le monde désire utiliser ce disque. Bien entendu, le hip hop serait arrivé malgré cette chanson, mais la planète aurait été bien différente aujourd’hui sans cette simple chanson, deuxième du disque.

On revient aujourd’hui… et cette chanson est encore utilisée! En fait, elle est tellement utilisée qu’un excellent documentaire a été tourné à son sujet et sur l’influence que ce disque a eu sur la musique: Sample This par Dan Forrer. Encore aujourd’hui, on utilise ce même rythme. Et pour le reste de l’album, c’est entre psychotronique et excellent, tout dépendant.

Côté qualité, la version originale du disque est très difficile à trouver à cause que les DJ du Bronx les ont carrément usés à la corde. Pour les peu de copies restant, c’est à des prix ridicules. L’étiquette et magasin de disque indépendant britannique Mr Bongo a décidé en 2014 de faire une version ultime du disque, à partir des bandes originales. Quelle version! Nul besoin de payer des centaines de dollars pour l’original quand on peut avoir une telle version pour le tiers du prix! Le disque répond parfaitement à la demande, est de superbe qualité, est beau, est fidèle à l’original et il sonne comme une tonne de briques. Wow!

Voilà qui met fin à ma semaine éditions 70s et moins. J’espère que vous avez aimé la gamme de disques de ces années. Retour à la programmation normale la semaine prochaine!

 

1973: Mike Oldfield – Tubular Bells

Est-ce que Tubular Bells a réellement besoin de présentation?

Album: Tubular Bells
Artiste: Mike Oldfield

En test: 1973 Vinyle (V.O. US)

Étiquette: Virgin
VR 13-105

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Acheter la version Black Friday 2013 Picture Disc chez Fréquences

C’est le genre de disque qui réapparaît régulièrement au fil des arrivages. Soyez patients si vous désirez une version vintage.

Album ayant frappé l’imaginaire de la planète, découvert via le film l’Exorciste en Amérique du Nord, le premier disque de Virgin Records, pièce ayant eu droit à des documentaires, des reprises, des études, nommez-les. Le tout avec un compositeur-interprète de génie ne cherchant pas à être la vedette, la très grosse majeure partie des instruments étant joués par Oldfield lui-même en multiples sessions sur le même ruban.

Et ce n’est pas rien. La pièce de plus de 45 minutes (25 et 23 minutes) fait pâlir d’envie les plus grands albums de progressive rock avec des mouvements allant du thème du début du disque jusqu’à la fin de la première face avec l’introduction des instruments individuellement en plus de 7 minutes, dont les fameux carillons tubulaires dans une apothéose d’instruments, avec chœurs en prime. Même la 2e partie, qu’on aurait pu penser reléguée en second plan, qui a été composée sur une beaucoup plus longue période, se révèle être impressionnante, avec multiples mouvements dont la partie carrément précurseur du death métal débutant vers le premier tiers de la face B avec les harmonies de lead guitars et les voix gutturales.

C’est le genre de disque qui faut avoir la bonne version. Un disque de plus de 20 minutes par face, en vinyle, ce n’est pas simple à jouer. Il y a 16 pistes en surimpression qui sont toutes utilisées à quelques endroits du disque. Parfois, les disques s’emballent, ne sont juste pas capables de reproduire toute la gamme musicale. C’est sans compter le transfert provenant du ruban qui peut être déficient parfois à la source. Je dirais que si vous désirez une version ultime, c’est le ruban en 7 1/2 pouces par seconde Virgin VGN 13105F que vous devez avoir. Mais sinon, le mieux est probablement de rechercher la version originale Virgin V2001, la version japonaise d’origine ou la version de 1997 en 180g… ou en sortant des vinyles, la nouvelle version de 2009 produite numériquement à travers les fichiers de production du SACD. Je ne vous recommande d’ailleurs pas la version japonaise récente: d’abord, elle est hors de prix, ensuite, elle provient des fichiers numériques. C’est aussi le genre de disque qu’on peut trouver partout, à peu de frais, et de qualité satisfaisante. Nul besoin de chercher la copie … La majeure partie des versions, tant qu’elle a été bien entretenue, va vous procurer amplement de joie et les versions audiophile sont plus des attrapes nigaud que des vraies versions audiophile.

Donc qualité … Ça va dépendre réellement de ce que vous allez trouver. Et attendez-vous tout de même à des bruits étranges, ça fait partie du lot de cette pièce unique d’anthologie. Mais ouf! Quel disque! Même ma petite version US simplette est incroyable.

1977: Musiques de l’O.N.F. Volume 1

L’Office National du Film n’est pas qu’un espace d’exploration pour les cinéastes. C’est aussi un espace d’exploration pour les compositeurs.

Album: Musiques de l’O.N.F. Volume 1: Musique sans image

Artistes variés

En test: Vinyle double 1977

Étiquette: Office National du Film du Canada

Ce disque a été acheté chez Fréquences il y a déjà deux bonnes années. Vous pouvez probablement en trouver une copie en-ligne.

L’ONF est une mine d’or d’exploration. Et je parle ici bien entendu des musiciens et des compositeurs. On peut penser à René Lussier par exemple qui est collaborateur pour les trames sonores de films depuis près de 40 ans.

Mais on peut aussi écrire livres et livres sur les techniques exploratoires musicales de l’ONF. Entre autres, le film permettant de recevoir de l’image mais aussi du son à travers différentes techniques d’impression de l’onde musicale, il n’en fallait pas plus pour que Norman McLaren travaille sur un procédé créatif de son gratté et de son photographié. Cet album est un hommage aux grands musiciens de la période de 1952 à 1971 qui ont marqué les films de l’ONF.

C’est expérimental! Et malgré que bien des chansons peuvent sonner électronique, elles sont surtout visuelles et peinturées. D’autres sont travaillées au ruban magnétique. Certaines sont des collages de sons ambiants. Et finalement, il y a la dernière chanson, Metadata, produite avec l’aide du Conseil National de Recherche du Canada, qui est la première expérimentation d’un ordinateur produisant des sonorités, le tout ensuite mixé en studio avec une trame sonore instrumentale. ceux qui me connaissent savent à quel point je suis un capoté des premiers balbutiements de synthèse informatique. J’ai été un des crackpots qui a demandé à Nadia Magnenat-Thalmann et Daniel Thalmann une copie VHS de leur film Vol de Rêve, question d’avoir la meilleure qualité possible de ce film incroyable. Alors pour moi, d’avoir une copie de Metadata en vinyle, c’est le pied… Mais c’est expérimental!

Et côté sonorité, c’est une compilation de pièces composées dans les années 52 à 71… prévues pour jouer sur film, parfois carrément composées sur film… et pièces qui sont voulues à pousser l’enveloppe, de musique contemporaine et (je ne crois pas vous l’avoir dit, vous m’en excuserez) expérimentale. Bref: le disque a un peu de bruit de fond il n’est pas totalement propre, il a une sonorité habituellement très sourde. Même les bandes ou films maîtres sont rendus à plusieurs générations, retravaillés avec les moyens du bord. Mais c’est de l’anthologie, c’est des techniques d’essais incroyables et c’est le pied à écouter, pour le peu que vous aimez la musique concrète.

On achète si on aime Pierre Henry, Iannis Xenakis, Edgard Varèse, Karlheinz Stockhausen.